Aix : Alzheimer, un nouveau pôle est né

Le pôle d'activité et de soins adaptés est réservé aux personnes qui résident au centre Duquesne.

Le pôle d'activité et de soins adaptés est réservé aux personnes qui résident au centre Duquesne.

Photos philippe laurenson

Aix-en-Provence

En accueil de jour, dans ce pôle de soins adaptés, des résidents du centre Duquesne vont vivre "comme à la maison"

Maurice n'est pas franchement à l'aise avec les pommes de terre qu'on vient de lui cuisiner. D'un bond, Christine se lève pour lui préparer une bonne purée : "Ce n'est pas grave Maurice, on aura au moins essayé !" Pas d'inquiétude, ici, on a le temps. Le temps de déguster son repas, de commenter le journal télévisé, de forcer le souvenir dans de longues discussions et même le temps de se regarder dans les yeux sans rien dire ; c'est important, ça aussi.

Au centre Duquesne, un établissement d'hébergement de l'hôpital d'Aix-Pertuis qui accueille 134 personnes âgées dépendantes (Ehpad), on attendait ce jour depuis 2009 : l'inauguration du pôle d'activités et de soins adaptés (Pasa), en direction des résidents souffrant de troubles "modérés" du comportement. Inscrit dans le plan Alzheimer, il aura fallu attendre toutes ces années pour concrétiser l'accueil de jour, qui ne nécessitait pourtant pas d'investissements délirants : "50 000 euros pour les travaux et l'équipement, puis la création de deux postes d'assistantes de soins en gérontologie, détaille Joël Bouffies, le directeur du centre hospitalier d'Aix-Pertuis. Mais vous savez ce que sont les carcans administratifs, la convergence tarifaire nous a empêchés de concrétiser le dossier jusqu'en 2014 ! Il a fallu de la ténacité !" Et l'équipe du centre Duquesne en a eu, jusqu'à trouver le lieu parfait pour développer son Pasa. "Les locaux attenants au centre Dusquesne appartiennent au CHU d'Aix-Pertuis mais nous avions un accord pour que l'hôpital Montperrin les utilise, pour son activité administrative, rappelle Chloé Marasca, responsable de l'établissement Duquesne. Nous avons donc convenu que nous récupérerions le lieu."

Ici, pas de médicament !

La chose est entendue et l'aventure commence. Médecin chef de service au centre Duquesne, Astrid Aubry détermine, à partir de critères précis, quels résidents ont besoin de fréquenter le Pasa. "Une quarantaine de nos résidents souffrent de maladies neurodégénératives. Souvent, c'est très difficile pour eux de se retrouver dans des espaces où il y a beaucoup de monde et il arrive que leurs réactions gênent la collectivité. Avec cette nouvelle structure, nous évaluons les besoins de chacune de ces personnes, afin d'organiser un planning." Ainsi, chaque jour, du lundi au vendredi de 10 h à 17 h, 14 résidents quittent le centre d'hébergement pour se retrouver dans ce qui ressemble à une maison. L'idée du Pasa étant, le Docteur Aubry insiste, de développer avec eux une approche douce, "sans médicament". Qu'y fait-on alors ? Des ateliers corporels, d'art-thérapie, d'aromathérapie, de musicothérapie, de zoo-thérapie, de cuisine, de lecture... "Il s'agit de générer des émotions positives, précise le Docteur Aubry. Lorsqu'on visionne un film triste, ce sentiment de mélancolie nous accompagne encore un long moment. Lorsqu'au contraire, on a vu un film gai, c'est la joie qui l'emporte. Ici, c'est la même chose, on essaie de provoquer des émotions agréables qui puissent accompagner les résidents, avec des moments qui leur rappellent ce qu'ils vivaient chez eux. Le Pasa, c'est un peu comme à la maison."

Un nouveau métier au CHU

En plus des intervenants qui animent les ateliers et la présence d'une psychomotricienne, deux postes ont été créés pour accompagner les personnes âgées au Pasa : Christine et Laetitia se sont portées volontaires. Une fois leur formation achevée, elles deviendront les premières assistantes de soins en gérontologie de l'hôpital Aix-Pertuis. Le Pasa a ouvert ses portes il y a un peu plus d'un mois et déjà, les deux professionnelles en distinguent les bienfaits. "On remarque que les résidents sont beaucoup plus apaisés. On prend notre repas en comité réduit, on discute, on boit un café ensemble et, les connaissant mieux individuellement, ils se confient plus facilement à nous. Parfois, ce n'est pas grand-chose, on pose une main sur la leur, lorsqu'on sent qu'ils en ont besoin et ce qui est intéressant, c'est que le lieu déclenche en eux des habitudes qui étaient les leurs lorsqu'ils vivaient à la maison." De leur côté, dans les étages de l'unité de soin, les soignants assurent que leurs charges sont allégées. De quoi inspirer au Docteur Aubry un remerciement tout particulier à la direction de l'hôpital : "C'est très précieux d'avoir soutenu un projet qui n'était absolument pas fait pour être rentable, une structure intégralement destinée au bien-être." Et il faudra bien, si l'on en croit les prédictions du directeur Joël Bouffiès, qu'il en existe bien davantage, à court terme : "Parmi les enfants qui naissent aujourd'hui, 50 % seront centenaires !" Vu comme ça...