Marseille : Bob le robot permet aux patients en réanimation de parler grâce à leurs yeux

Les professeurs Lionel Velly et Nicolas Bruder ainsi que Yann Gogan, le psychologue clinicien du service de réanimation expliquent au patient les fonctions de la tablette.

Les professeurs Lionel Velly et Nicolas Bruder ainsi que Yann Gogan, le psychologue clinicien du service de réanimation expliquent au patient les fonctions de la tablette.

Photo La Provence

Marseille

C'est leur oeil qui commande l'ordinateur. Un immense progrès

La prise en charge des patients et de leur famille au sein des services de réanimation évolue. Humaniser ces unités de soin, c'est en tout cas la politique affichée par l'équipe dirigée par le Pr Nicolas Bruder, à l'hôpital de la Timone. "Dans les années 80, les patients restaient sous sédation artificielle pendant plusieurs jours. Or, depuis une dizaine d'années, on s'est aperçu qu'en les réveillant rapidement, les malades avaient une meilleure récupération, souligne le Pr Bruder. En s'ouvrant de nouveau sur la vie extérieure, le traumatisme est moins grand. On note aussi que le nombre de troubles psychiatriques, développés lors du passage en réanimation, était en nette diminution."

Dans le souci d'améliorer cette prise en charge, les plages horaires des visites ont également été élargies. Pour le chef de service, l'implication et la présence des proches augmentent de manière significative le processus de guérison. Si tout est mis en oeuvre pour le bien-être des patients, la communication demeure cependant un réel problème. "Les malades sont conscients mais sans possibilité de communiquer parce qu'ils sont soumis en particulier à la ventilation artificielle, convient le Pr Lionel Velly, anesthésiste-réanimateur du service. Cette incapacité à communiquer est souvent source de frustration et de stress aussi bien pour les patients, les familles que les soignants."

Alors, pour améliorer la communication, le service de réanimation polyvalente de la Timone a créé de toutes pièces "Bob", un robot très particulier.

"Bob", c'est un ordinateur sur pied équipé d'une commande oculaire, l'eye tracker, qui permet le pilotage d'un logiciel par le seul mouvement du regard. "C'est extrêmement simple à utiliser et il permet d'avoir une communication assez riche", poursuit le Pr Velly.

"Bob", on le doit surtout à la pugnacité de Yann Gogan, le psychologue clinicien du service : "Son utilisation est relativement simple. Mais il faut quand même avoir un minimum de concentration. On retrouve des pictogrammes qui permettent au patient d'exprimer son état. S'il souffre, s'il souhaite voir un médecin..."

Depuis sa mise en place, "Bob" a permis de recréer du lien. C'est l'histoire de Blandine et de son mari Yann. Il y a un an, la vie du couple a basculé. Pendant quatre semaines, Yann est plongé dans un coma artificiel. Blandine apprend à vivre au milieu des machines, des tubes et des alarmes. "Un monde terriblement angoissant", dit-elle. Au réveil de son époux, elle apprend à communiquer différemment avec lui. "Je voyais dans ses yeux qu'il était frustré de ne pas parler, de ne pas se faire comprendre, poursuit la jeune femme. Cela avait le don de l'énerver." On leur propose alors de tester le robot. "On n'a pas hésité une seule seconde. Et devinez la première chose que mon mari a demandée ? Voir un médecin ! "

Si le CHU de Rennes a été le premier centre hospitalier à utiliser l'eye tracker, Yann Gogan a amélioré les performances avec un coût de fabrication moindre.

Désormais, à la Timone, l'objectif est de développer cette technologie pour en faire profiter éventuellement les autres structures hospitalières.

L'Eye tracker, qu'est-ce que c'est ?

"Bob" est un ordinateur relié à un eye tracker, une technologie issue du monde du marketing et du gaming qui permet de savoir où est posé le regard. Grâce à ce système, toute personne capable de voir un écran peut alors utiliser un ordinateur. Après un calibrage très précis, le programme permet de naviguer uniquement grâce au regard, le tout dans une interface simplifiée par des pictogrammes. Grâce à une nouvelle mise à jour de la licence Windows, les patients peuvent désormais utiliser des outils tel le programme de traitement de texte Word.