Pertuis : ses biscuits valent des millions

Shanty Baehrel, fondatrice de l'entreprise Shanty Biscuits, n'hésite pas à se mettre en scène dans ses posts sur les réseaux sociaux. Elle a même des tatouages en forme de biscuits. Elle souffle aujourd'hui ses trente ans.

Shanty Baehrel, fondatrice de l'entreprise Shanty Biscuits, n'hésite pas à se mettre en scène dans ses posts sur les réseaux sociaux. Elle a même des tatouages en forme de biscuits. Elle souffle aujourd'hui ses trente ans.

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Pertuis

Shanty Baehrel triple chaque année la croissance de sa marque de biscuits personnalisables créée en 2013. Elle doit agrandir son site de production, déménage en octobre et ouvre sa 1ere boutique à Paris l'an prochain

La première fois qu'on a rencontré Shanty Baehrel, c'était dans la cuisine de ses parents. Cette jeune femme au discours encore mal assuré nous avait proposé des biscuits démoniaquement divins qu'elle sortait à peine du four. Cinq ans après, elle a grandi dans tous les sens du terme. D'abord, parce qu'elle fête aujourd'hui même ses trente ans. Mais surtout parce qu'en cinq années, elle a fait prospérer une petite idée de rien en une entreprise florissante.

Le concept de sa marque "Shanty biscuits" ? Vendre des biscuits personnalisables à l'envi sur le web. Des prénoms, des logos mais aussi et surtout des phrases décalées qu'elle poste quotidiennement sur les réseaux sociaux : "je te quitte connard", "les dragées c'est naze", "la Saint-Valentin ça sert à rien", "serre-moi dans tes draps", "t'es pas célibataire pour rien" ou encore "merci du fond du cul", "laisse tomber il est gay", "la voiture est à la fourrière", "ton mec est un bon coup"...

Car la demoiselle étant ultra-connectée, elle s'est servie des nouvelles armes que sont Instagram et Facebook pour faire sa com'. Et ça a marché plus que de raison. "Près de 30 % des achats sur le site marchand viennent d'Instagram, explique-t-elle. Sans ce réseau social, je n'aurais jamais percé si vite. J'aurais vivoté et me serais arrêtée avant." Il le lui rend bien puisqu'elle est suivie par près de 49 000 personnes. Elle a aussi été sélectionnée en juin pour participer au salon des "Instapreneurs" au côté de 49 autres start-up françaises.

Celle qui n'a désormais plus de complexe à dire qu'elle n'a pour tout bagage qu'un bac S, n'en est qu'aux balbutiements de ce qu'elle souhaite accomplir.

Avec une croissance qui triple chaque année, l'entreprise pourrait atteindre en 2019 les 5 millions d'euros de chiffre d'affaires. Son atelier de production trop à l'étroit (en 2017, un million de biscuits ont été vendus), va migrer de la zone d'activités de Pertuis à Vitrolles, passant de 160 actuels à 820 m².

Et cette évolution ne s'arrête pas là : de neuf salariés, l'équipe va atteindre les 15 personnes à la fin de cette année. En septembre, Shanty a ouvert également un bureau à Paris. Car en 2019, la PDG lancera un deuxième produit : le mini-biscuit vendu dans les bars, hôtels et restaurants pour agrémenter le café. De nouvelles machines vont compléter les actuelles permettant de fabriquer entre 80 000 et 100 000 biscuits et mini-biscuits par jour. Vendus sur internet mais aussi dans une boutique en nom propre à Paris en 2019 et à... New York en 2020.

Comme une rock star

Le 30 octobre, elle est invitée au salon du chocolat de Paris. Elle vient aussi d'être finaliste du prix Clémentine du concours Veuve-Cliquot qui récompense une femme d'affaires. Elle est invitée à parler de son expérience dans des conférences et enchaîne les interviews tant son succès et l'identité de son produit séduisent. La montée d'adrénaline, cette fan du groupe Green day la vit 7 jours sur 7 grâce à son entreprise à qui elle donne tout son temps.

Alors oui, elle vient de passer quatre ans sans aucun jour de vacances. Oui, elle ne pense qu'à sa boîte matin, midi et soir. Mais elle assume depuis peu le fait que ce soit sa raison de vivre. Pas de copain, pas de famille mais l'impression d'être là où elle doit être : "Ce qui me fait vibrer c'est Shanty biscuits. Je suis mes objectifs. J'ai peu de temps libre et quand j'en ai, je le consacre à ceux qui peuvent comprendre ça. Mes amis, ce sont surtout des entrepreneurs qui vivent lesmêmes difficultés que moi et le même rythme et puis mon équipe bien sûr. J'assume le chemin que j'ai pris. Je pense que les gens qui me suivent sur les réseaux sont aussi touchés par mon parcours parce qu'ils peuvent s'identifier. Je suis partie de rien. Je me suis formée avec des vidéos sur Youtube et j'apprends tous les jours des personnes que j'ai recrutées. Je ne complexe plus."

C'est peu dire que ses biscuits, elle les a dans la peau : deux tatouages (sur un poignet et derrière un bras représentant leur forme), un autre à la cheville en forme de "like" d'Instagram. Décalée, elle l'est aussi dans son mode de vie : elle vit partout et nulle part (en coloc à Paris et en Airbnb lorsqu'elle est dans la région), elle a vendu sa voiture et en loue une ponctuellement. Bref, pas d'attache si ce n'est ses biscuits.

"C'est une vie solitaire, c'est sûr. Mais je suis heureuse comme ça pour l'instant. Ma vie perso, j'essaie de l'effacer. Certains ne comprennent pas pourquoi je me fixe encore des objectifs. Ils me disent que je devrais prendre des vacances. Mais je n'ai pas envie de m'arrêter. Je ne suis pas à la fin de cette aventure, je veux aller plus loin." Cette ambition assumée fait d'elle une personne atypique et libre. Ce qui a dû charmer les multiples entreprises qui ont fait appel à ses services : LVMH, L'Oréal, Air France, Chloé, Sephora, Total, Canal +, EDF, Orange... En attendant, ce soir, elle soufflera ses trente bougies et quoi qu'il arrive dans l'avenir, ces cinq années-là auront formé cette femme de demain.