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5 juin 1983, le jour de gloire de Yannick Noah | "La France l'a épousé ce jour-là", dit Hervé Duthu

Bertrand Milliard

Mis à jour 05/06/2023 à 11:07 GMT+2

GRAND ENTRETIEN - Hervé Duthu, ancien commentateur vedette du tennis sur TF1 est l'homme qui a posé sa voix sur la finale de Roland-Garros 1983. Témoin privilégié de l'épopée Noah, le journaliste était aussi un proche du champion français et donc au cœur de cette folle quinzaine. Il nous permet de voyager quarante ans en arrière pour revivre cet événement historique réalisé par un homme à part.

Yannick Noah le 5 juin 1983. Le jour de gloire.

Crédit: Getty Images

Hervé, vous étiez en 1983 l'un des rares commentateurs de tennis à la télévision française. Qu’est-ce qui vous a amené à le devenir ?
Hervé DUTHU : Celui qui a fait en sorte que le tournoi de Roland-Garros soit retransmis, Christian Quidet, a quitté TF1 pour être remplacé par un autre Directeur des sports, un ancien du Monde et de l'ORTF, François Janin. Ce dernier m'a demandé de quitter Antenne 2, où j'officiais, pour rejoindre TF1. J'y ai hérité du tennis et d'une émission autour du tennis qui s’appelait Balle de match. J'ai fait venir un autre ancien journaliste de "la deux", Alain Teulère, pour faire cette émission mensuelle avec moi.
Qu'est-ce que le tennis à la Télévision Française en 1983 ?
H.D. : C'est déjà quelque chose de très important, en pleine ascension. Depuis les années Pecci, vers 1978, les gens regardaient beaucoup. Et puis il y avait un groupe de joueurs français qui marchaient bien, dont le leader naturel était Yannick Noah.
Comment était diffusé le tournoi de Roland-Garros ?
H.D. : C'était diffusé pratiquement toute la journée. On commençait le matin à 11 heures, c'était sur une seule chaîne, et on terminait vers 19h30, 20h. Lors du quart de finale de Noah contre Ivan Lendl, le journal de 20h avait même été repoussé pour qu'on puisse voir la fin du match, avec probablement ce qui avait été la meilleure audience, plus que la finale encore, ce qui est naturel vu l'horaire.
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Yannick Noah après sa victoire en quarts de finale contre son ennemi juré, Ivan Lendl.

Crédit: Getty Images

Est-ce qu’en début de tournoi, avec cette belle génération française, notamment autour de Yannick Noah, il y a un engouement particulier, est-ce que le public s’est dit qu’il pouvait gagner ?
H.D. : Les choses se sont faites petit à petit. Il y a ce groupe avec Noah, Portes, Moretton, qui apparaît vers 1978. Yannick a commencé à gagner des petits tournois, Manille, Calcutta je crois, cette année-là. En 1979 il gagne le National après avoir été menacé par Christophe Roger-Vasselin qui menait deux sets à zéro, et les progrès se font petit à petit. Il est battu par Connors à Roland-Garros en 1980, l'année suivante il est encore battu et puis 1982 est une année charnière parce qu'il se rapproche un peu des meilleurs.
L'équipe de France brille en Coupe Davis et se retrouve en finale à Grenoble face aux Etats-Unis. Le sort désigne Noah face à McEnroe, alors numéro 1 ou 2 mondial, comme premier match. C'était sur terre battue couverte, qui va plus vite, et Noah finit par perdre après avoir mené deux sets à un. Au-delà de la déception énorme que cela a été pour lui, au-delà de la rupture qui s'est faite dans sa tête avec pas mal de choses au niveau de la FFT et de la DTN à ce moment-là, lui sentait qu'il se rapprochait. Tout un programme a été mis en place avec Patrice Hagelauer, en qui il avait une confiance absolue, et qui au-delà de l'entraîneur était un ami, pour arriver en pleine forme à Roland-Garros.
Quand ce programme a-t-il débuté ?
H.D. : Cela devait commencer à Monte-Carlo et là, Noah a été battu par Orantes, qui était en toute fin de carrière. Ça a été une surprise. En fait, Noah était sorti la veille très tardivement avec ses copains. Donc il y a eu une bonne engueulade et ils se sont mis à bosser comme des malades pendant deux mois et demi, mais vraiment comme des malades ! Un boulot entrecoupé par les tournois de Hambourg, de Madrid et de Lisbonne. Il a perdu en ayant balle de match en finale à Lisbonne contre Wilander et il a gagné Madrid et Hambourg en prenant sa revanche au passage sur Wilander en quarts. Donc il est arrivé avec le plein de confiance à Roland-Garros. Il est arrivé très fort physiquement. Le seul qu'il craignait vraiment c’était Ivan Lendl, qui était sa valeur étalon depuis les catégories jeunes.
Son entraîneur, Patrice Hagelauer, était un entraîneur fédéral ?
H.D. : Oui. En 1982 Noah a senti qu'il avait besoin de quelqu'un en permanence avec lui. Il y a donc eu un accord avec la Fédération où cette dernière mettait Patrice Hagelauer à disposition. Plus tard, il a pu également signer des contrats avec Henri Leconte sur une certaine période. Hagelauer était celui qui était demandé par Noah, puis Leconte, puis Forget.
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Yannick Noah et Patrice Hagelauer en 1983.

Crédit: Getty Images

Quel souvenir gardez-vous du parcours en lui-même lors de ce Roland-Garros ?
H.D. : Il est apparu qu'il passait les tours assez facilement. Il y a eu des petites alertes, contre Pat Dupré au 3e tour je crois, mais il n'a pas affronté les spécialistes de terre battue, hormis Pecci au deuxième tour qui n'était plus du tout le Pecci finaliste en 1979. Le tournoi commençait réellement en quarts de finale avec ce match qu'il craignait contre Lendl. Il l'a gagné, et de quelle façon ! Il aurait pu le gagner en trois sets puisqu'il menait deux sets à zéro et 5-2 et il a eu ce stress qu'ont tous les joueurs au moment de conclure, une petite saute de concentration et il a perdu le troisième.
Heureusement derrière qu'il gagne le premier jeu du quatrième set, parce que sinon ça aurait pu mal tourner. Finalement, il marche sur Lendl dans cette manche et lui met 6-0, ce qui est presque insensé contre le Tchécoslovaque. Lendl n'avait pas encore gagné de Grand Chelem mais c'était déjà un immense joueur, parmi les trois premiers mondiaux, il avait fait finale en 1981. Pour lui comme pour Noah, ça s'est fait par étapes et les années précédentes ont servi en 1983 pour Noah.
À titre personnel, vous étiez proche de Yannick Noah déjà à l'époque. Pouvez-vous nous parler de votre relation avec lui ?
H.D. : On se rencontre au moment où je suis encore à Antenne 2. Je décide de faire un portrait de ce groupe de joueurs et je commence par Noah, ce doit être début 79. Le courant passe bien, il y a un groupe, moi ça fait peu de temps que je commente le tennis, qui m'a été offert un peu par hasard, en raison d'une panne de son en Angleterre. Roger Couderc, qui commentait le rugby mais aussi le tennis, n'a pas pu commenter parce que le son ne passait pas. On m'a donc appelé pour commenter le tournoi de Wimbledon depuis Paris et derrière j'ai eu le privilège d'être confirmé par Robert Chapatte.
C'est comme cela que vous avez commencé à côtoyer Noah et les autres ?
H.D. : Ces joueurs avaient sept ou huit ans de moins que moi, mais c’était la même génération, donc je les voyais beaucoup. À l'entraînement, où j'allais les voir dès que j'avais un petit moment et puis on sortait souvent dîner le soir. Pas forcément des grandes fêtes mais ça se prolongeait parfois très tard et c'est comme ça que sont nées les relations. Et puis après un peu plus intimement encore, au sein même de la structure familiale, pour des raisons personnelles, j'ai connu l'ensemble de sa famille et j'ai eu une grande proximité avec eux tous.
Ce qui fait qu’être le commentateur de ce tournoi et de la victoire de Yannick Noah, est quelque chose de particulier. Est-ce que vous le vivez de façon différente du fait de cette proximité avec Yannick ?
H.D. : Oui forcément, mais à l'époque il n'y a pas eu de champion français dans un sport individuel depuis longtemps, la France ne gagne pas, et je pense que tous les journalistes rêvaient d'avoir une proximité avec Yannick Noah. Bien évidemment que ça influe sur les commentaires mais je pense qu'il est important de savoir le plus de choses possibles sur un athlète. Plus on a d'éléments, plus on est en mesure, sans trahir quoi que ce soit d'intime, de mieux expliquer les choses, de mieux comprendre le jeu lui-même, les émotions et les réactions d'un joueur sur le terrain.
Peut-on rester "objectif" ?
H.D. : J'étais partie prenante, je souhaitais sa victoire, au fond comme à peu près tout le monde puisque L'Equipe titrait le jour de la finale "50 millions de Noah", mais ça ne changeait pas la donne. Je commentais et j'essayais d'avoir la distance nécessaire pour ne pas tomber dans un chauvinisme absolu. Mais je pense que je n'ai jamais été très chauvin, parce qu'il ne suffit pas d'être français pour aimer les gens, que ce soit un sportif ou un autre être, ce n'est pas une raison suffisante. Il m'est arrivé d'avoir des affections pour des joueurs étrangers qui se sont développées au fil des années également.
Vous avez formé avec Jean-Paul Loth un duo assez mythique à l'antenne, mais pour cette finale, vous commentez seul. C'est quelque chose d'assez incroyable, aucun Français n’a gagné de Grand Chelem depuis 1946 mais il n'y a pas de consultant. Pourquoi ?
H.D. : Déjà, les consultants n'existaient pas à la télévision à l'époque. En foot, c'était Thierry Roland et Bernard Père qui commentaient, sur le tennis il n'y avait pas de consultant, il n'y a qu'en rugby avec la paire Couderc-Albaladejo qu'on en trouvait un. Et puis à l'US Open, quand j'étais sur Antenne 2, on retransmettait en intégralité les deux demi-finales masculines entrecoupées par la finale dames. On pouvait commenter pendant onze heures d'affilée. Je vivais beaucoup avec le groupe France dont Jean-Paul faisait partie et je leur avais dit "Venez un peu me donner un coup de main, entre deux matchs il y a quinze à vingt minutes et on garde l'antenne". Jean-Paul m'avait répondu « je viens volontiers » et il était resté, il avait trouvé ça emballant.
Qu'a-t-il apporté ?
H.D. : Il m'avait dit "Il faut arrêter le commentaire comme si c’était une cathédrale, il faut absolument que ça pète de partout, il faut hurler etc." et à ce titre là il avait raison. Il m'a sorti un peu d'un confort personnel, à tel point que lorsque je suis arrivé à TF1, j'ai demandé à ce qu'il vienne immédiatement et qu'on lui fasse un contrat. On a donc commenté ensemble mais parallèlement à ça, il était Directeur Technique National et il voulait qu'une victoire valide un peu son poste de DTN. Il m'a dit la veille de la finale que sa place était plutôt dans le box du DTN en ajoutant "Je pense que pour Yannick, c’est important que je sois là".
Était-ce aussi votre avis ?
H.D. : Moi je savais à peu près tout du ressenti et des relations un peu complexes et difficiles à ce moment-là entre Yannick, Jean-Paul et la Fédération. Donc je lui ai dit "Ecoute, si Yannick a besoin de toi, il faut y aller". (souriant) Et puis il y a eu la finale. J'ai revu Jean-Paul l'autre jour et je lui ai dit en rigolant "Ben oui j’ai commenté la finale seul finalement et tu le regretteras toute ta vie d'avoir été dans le box" et c'est vrai ! (rires) Il regrette aujourd'hui de ne pas avoir été avec moi pour ce qui est la seule victoire française depuis quarante ans en Grand Chelem chez les hommes.
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Jean Paul Loth et Yannick Noah.

Crédit: Getty Images

En raison du contexte et de tout ce qu'on a évoqué plus haut, est-ce que vous vous sentez un peu tendu, un peu stressé par rapport à d’habitude au moment de commenter cette finale ?
H.D. : Je suis stressé comme tous les gens qui vont assister au match et ont envie que Noah gagne. Il y a forcément un stress mais pas particulièrement par rapport à un commentaire à faire. C'est un stress de supporter tout simplement. Et j'ai le souvenir de l'ambiance à Roland-Garros, c'était vraiment un silence de cathédrale. On va assister à une pièce de théâtre et ce sont les trois coups qui tombent, avec le silence qui s'impose immédiatement. C'est ce silence dont je me souviens. Au début, tout le stade était tendu et ça s'est débloqué en partie dès le premier set parce que Yannick a rapidement emballé le match. Les gens se sont un peu libérés et ont encouragé. Quand il a perdu son break d'avance dans le 3e, avec des échanges un peu durs, des volées moins bien finies, on se dit "Il faut qu’il gagne là parce que sinon il ne gagnera pas" mais ça, je n'en suis pas sûr du tout.
Pourquoi ?
H.D. : Parce qu'il était le plus fort physiquement dans ce Roland-Garros. C'était vraiment l'athlète le plus complet, le plus fort. Ce n'était pas le plus génial techniquement, mais le plus fort athlétiquement, physiquement, dans la volonté. C'est lui qui était le plus impliqué, le plus engagé et qui mettait le plus d'intensité.
Est-ce que vous étiez seul en cabine ou y avait-il d'autres personnes ?
H.D. : Non je suis absolument seul, absolument seul. Ce n'est pas gênant parce que j'en avais l'habitude. Le problème n'est pas de commenter seul mais que c'est plus agréable à deux, parce qu'il y a une relance, parce qu'il y a deux voix différentes, parce qu'on peut rire, échanger, alors que le tennis est un sport qui impose à la fois du silence mais aussi parfois une explosion de joie. C'est un sport particulier parce que ça peut être un point génial puis trois points épouvantables, donc il faut rester mesuré. Rester mesuré, c'est faire en sorte de respecter les joueurs. Le silence s'impose à l'échange et l'explosion vient ou ne vient pas parce qu'il y a beaucoup de matchs où il ne se passe vraiment rien, vraiment rien (il insiste). Il n'y a que le score quoi.
Rentrons maintenant dans l'après-finale. Vous rendez l'antenne après la remise de la coupe et que se passe-t-il ensuite ? À quel moment le revoyez-vous pour la première fois ? Au stade ?
H.D. : Non, je ne le vois pas au stade. Des gens de la famille viennent me voir en cabine et me disent "Rendez-vous ce soir, on se retrouve tous à Nainville-les-Roches". C'était le village où se trouvait la maison de Yannick. J'y allais très souvent à ce moment-là et donc je suis parti à Nainville mais je devais négocier avec François Janin pour ne pas présenter le résumé du soir. Il était diffusé vers 22h30 et je n'avais vraiment pas envie de le présenter donc ça a été négocié et accepté. On m'a juste demandé d'amener Noah au 13 heures parce que Yves Mourousi voulait absolument l'avoir. Ce n'était pas gagné non plus parce qu'il avait d'autres sollicitations et qu'on était crevés mais il l'a fait, il est venu, le lendemain ou le surlendemain et la chaîne était contente. J'ai trouvé ça super de sa part.
Cette fameuse fête, on en a beaucoup parlé. Sans dévoiler de choses particulières, c’était quoi finalement cette fête de Nainville-les-Roches ?
H.D. : Quand on en parle, on exagère beaucoup en évoquant la "dinguerie" de la fête. Nainville-les-Roches, c'était sa propriété, sa première maison à Yannick. Il avait vécu dans le 16e arrondissement tout près de Roland-Garros mais c'était sa première acquisition, en dehors de Paris, le premier lieu où il avait investi de l'argent.
A quoi ressemblait cette maison ?
H.D. : Il y avait une toute petite piscine, qui devait faire six mètres sur trois, il y avait un court de tennis. C'était une très belle maison et on y était très souvent. Donc ce soir-là, le portail était ouvert. Il y avait ses copains de départ, du Racing, parmi lesquels Michel Grach et Alain Fitoussi. Ils avaient des relations avec des gens du milieu des variétés et Yannick connaissait déjà le groupe Téléphone. Donc on a fait venir Téléphone avec tout son matériel et il y a eu un concert privé avec tout le groupe. Et puis il y a eu des jets dans la piscine, beaucoup de beuverie… Vraiment une fête et une joie, une joie absolue. Je ne suis pas resté jusqu’au matin, je suis allé me coucher mais voilà, c'était simplement une fête, des gens contents, et comme le portail était ouvert, il y avait des voisins proches qui venaient, des gens de la région, c'était portes ouvertes et il y en avait pour tout le monde. Cela a été une libération, une explosion de joie. On parle de dinguerie de fête, il n'y a pas de dinguerie particulière, c'était une fête et une joie. Surtout un soulagement qui s'exprimait à travers cette fête.
Quelle relation avez-vous gardé au fil du temps avec Yannick Noah ?
H.D. : J'ai gardé les mêmes relations, de très bonnes relations. On n'était pas en contact tout le temps parce que lui allait disputer des tournois. On se voyait quand il était à Paris mais je voyais Yannick comme je voyais Pascal Portes avec qui j'étais très proche. On se voyait très souvent, avec également Patrice Hagelauer. Je pouvais aller chez lui en vacances, ou aller chez Yannick ou chez Pascal Portes. De mon côté je me suis un peu éloigné du tennis pendant quelques années parce que TF1 a perdu les droits mais je continuais à voir ceux qui étaient mes amis avant d’être des joueurs de tennis.
Et aujourd'hui ?
H.D. : Aujourd’hui, je vis à l’étranger depuis pas mal d'années, donc je ne vois pas les gens tous les jours. Mais à l'occasion de ce Roland-Garros et de la fête ô combien méritée qui est faite à Yannick pour ce qu'il a apporté au tennis français, je suis heureux de revoir les visages de tous ces amis. On s'est vu, on a ri. Quarante ans après c'est formidable de se retrouver comme s'il n'y avait pas eu d'arrêt dans nos rapports. De son coté, Yannick est rentré dans le show-biz, qui n'est pas tout à fait mon truc, mais il reste un homme foncièrement bon, bienveillant, généreux…
Que pensez-vous de l'hommage qui lui est rendu à l’occasion de l’anniversaire des quarante ans de sa victoire ?
H.D. : Quand je vois ce qu'il a apporté au tennis français, c'était vraiment la moindre des choses que des hommages lui soient rendus. Car il a aussi renouvelé cette victoire à travers la Coupe Davis. S'il n'est pas capitaine, il n'y a pas la Coupe Davis en 1991, c'est une évidence. Il n'y a que lui qui était capable de fédérer comme il l'a fait, de mettre les types à plat ventre, à escalader quasiment l'Everest. Il a relevé des paralytiques et enlevé des peurs et cela a été une libération. En face, c'était Sampras et Agassi, les deux meilleurs joueurs mondiaux, donc la France partait de loin.
Pour revenir sur l'hommage, je trouve dommage qu'il n'y ait pas eu un court à son nom. Avec tout le respect que j'ai pour Simonne Mathieu, Noah, ce n'est pas seulement une victoire en Grand Chelem, c’est une histoire, un chemin qui s'ouvre, il y a tout. Un autre Grand Chelem remporté par lui n'aurait rien apporté de plus à l'histoire. Il faut remettre dans le contexte. 1983, il y a la gauche au pouvoir depuis deux ans et l'espoir que ça a fait naître chez un peu plus de la moitié de la France. Et puis les difficultés économiques qui s’en suivent, les dévaluations, le gouvernement Mauroy. La France n'a jamais gagné et Noah surgit. Noah, c'est quoi ? C’est un Français issu d'une blanche et d'un noir, à l'époque où il y a encore beaucoup de racisme, un petit mec métisse qui arrive d'Afrique. La belle histoire se construit et, finalement, c'est le premier qui gagne, donc c'est au-delà d'un Grand Chelem, au-delà d'une victoire, ce n'est plus tout à fait du tennis. Noah s'est emparé de quelque chose, du cœur de la France. La France l'a épousé ce jour-là.
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Yannick Noah après sa victoire en 1983.

Crédit: Getty Images

À titre personnel, je tiens à remercier très chaleureusement Hervé Duthu sans qui je n'aurais sans doute pas eu la même trajectoire professionnelle. C'est lui qui m'a mis le pied à l'étrier puis appris les bases de ce métier de journaliste et de commentateur. Je ne peux que lui en être pour toujours reconnaissant.
Bertrand MILLIARD
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