Dimanche 4 juin, le centre de congrès qui borde le lac Michigan, à Chicago (Illinois), était en effervescence. Des milliers de femmes et d’hommes, médecins oncologues, chercheurs et salariés des laboratoires pharmaceutiques, arpentaient les couloirs de cet édifice tentaculaire, en quête d’une présentation à ne pas manquer, d’une réunion à suivre, d’un stand à visiter. Avec 43 000 participants, la grand-messe annuelle de la cancérologie, le congrès de la Société américaine d’oncologie clinique (ASCO), était revenue aux niveaux de fréquentation des années antérieures – celles d’avant la crise sanitaire.
Quoi de neuf cette année, en matière de prise en charge des cancers ? Les petits ruisseaux font de grandes rivières : l’édition 2023 de l’ASCO illustre parfaitement l’adage. Pas de révolution majeure, mais une somme de « progrès à petits pas » qui confortent l’intérêt de deux stratégies en plein essor. Il s’agit, d’une part, d’administrer des traitements innovants à des patients atteints de cancers précoces, encore localisés (non métastasés) ; d’autre part, de personnaliser les thérapies selon le « profil de la tumeur » de chaque malade (par exemple, ses anomalies moléculaires).
Démonstration, à Chicago, avec le deuxième cancer le plus fréquent au monde, celui du poumon. Soit 2,21 millions de nouveaux cas et 1,8 million de décès chaque année sur la planète, dont plus de 46 000 cas et 33 000 décès en France.
A 14 heures ce dimanche, pas moins de dix écrans géants retransmettaient, dans un hall bondé, la présentation qui ouvrait la série des « sessions plénières », ces temps forts du congrès. Tous attendaient les résultats d’une étude présentés par Roy Herbst, de l’Ecole de médecine de Yale (Connecticut).
L’enjeu ? Evaluer, chez certains patients atteints d’un cancer du poumon à un stade précoce, l’intérêt d’ajouter au traitement standard un médicament ciblant l’anomalie moléculaire présente dans leur tumeur. En effet, au moins de 10 % à 15 % de ces patients (et même davantage dans certains pays) portent une mutation dans un gène codant une protéine nommée EGFR. Une fois mutée, cette protéine provoque une multiplication effrénée, anarchique, des cellules tumorales. Les cancers concernés ici, précisons-le, sont du type « non à petites cellules », les plus fréquents.
Une espérance de vie qui « bondit de un à quatre ans »
Les laboratoires ont donc développé des médicaments qui inhibent les protéines EGFR mutées. Si les deux premières générations manquaient de spécificité – elles inhibaient aussi la protéine EGFR normale, présente à la surface de toutes les cellules, d’où leurs nombreux effets indésirables –, la troisième est plus sélective. Son principal représentant, l’osimertinib (laboratoires AstraZeneca), était au centre des attentions du jour.
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