La jungle, dense et immense, attend au loin. « Les enfants sont vivants », affirme le colonel Fausto Avellaneda, qui, sur le tarmac de l’héliport militaire de San José del Guaviare, au centre de la Colombie, coordonne la logistique de l’opération « Espoir ». Les chances de retrouver les quatre enfants qui, le 1er mai, ont survécu au crash de leur avion semblent bien minces. Mais, ici, dans le département du Guaviare, personne ne doute que Lesly, 13 ans, Soleiny, 9 ans, Tien, 4 ans, et la petite Cristin de 12 mois sont encore en vie. Samedi 3 juin, le colonel supervise le départ de deux « binômes maître-chien » de la défense civile qui seront « insérés dans la jungle », à 175 kilomètres de là, pour rejoindre les équipes de recherche.
Le pilote du Cessna 206 qui s’est écrasé à la suite d’une panne de moteur avait eu le temps d’alerter la tour de contrôle. Mais il a fallu deux semaines pour repérer la carcasse du petit avion dans l’épaisseur de la forêt. Les corps des trois adultes qui voyageaient à bord (le pilote, la mère des enfants et un chef indien) ont été retrouvés. Les enfants ont inexplicablement survécu, et disparu. Il n’y avait pas de traces de sang à l’arrière de la carlingue. A côté de l’avion, un sac était ouvert. L’imagination s’est enflammée.
Deux jours plus tard, le 17 mai, une erreur de communication est venue nourrir les attentes. Les services locaux de la protection de l’enfance ont informé la direction nationale, à Bogota, que les enfants avaient été retrouvés. L’annonce, inexacte, transmise au président, Gustavo Petro, s’est immédiatement retrouvée sur son fil Twitter et a été reprise par les médias, sans que personne ait pris la peine d’appeler les militaires pour la vérifier. Le lendemain, le chef de l’Etat a dû effacer son tweet.
L’espoir de retrouver les enfants est d’autant plus vif qu’ils ont laissé des traces. Un biberon a d’abord été découvert, puis des feuilles coupées comme pour faire un abri, un élastique à cheveux, une paire de ciseaux, des couches usagées et des empreintes de pied. Les enfants se sont déplacés sur plusieurs kilomètres mais n’ont pas marché en ligne droite.
« Commandos conjoints »
« Ce ne serait pas la première fois que des enfants indigènes survivent seuls dans la jungle pendant des jours », rappelle le colonel Avellaneda. Les quatre enfants appartiennent à la communauté des Huitoto. Ils connaissent le terrain. Le gouverneur du département du Guaviare, Heydeer Palacio, est du même avis : « Nos gamins à nous, les Blancs, sont des incapables, dit-il. Mais un enfant indigène sait nager à 4 ans. A 9 ans, il sait reconnaître les fruits comestibles et pêcher. Et, à 13 ans, une petite indigène est pratiquement une adulte. »
Il vous reste 46.48% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.