AgricultureAvec le gel, est-ce qu’il y aura des pommes à la rentrée prochaine ?

Vague de gel : Est-ce qu’il y aura des pommes à la rentrée prochaine ?

AgricultureMême si elle est fragilisée dans le Limousin, la pomme a de sérieux atouts face au froid, à commencer par des bourgeons plus tardifs
Présente sur des territoires variés, la pomme est plutôt bien lotie face aux épisodes actuels de gel. (photo d'illustration)
Présente sur des territoires variés, la pomme est plutôt bien lotie face aux épisodes actuels de gel. (photo d'illustration) - Illustration/Pixabay / Illustration/Pixabay
Caroline Delabroy

Caroline Delabroy

L'essentiel

  • La France devrait connaître encore deux nuits et matinées très fraîches, voire avec des températures négatives. Et ce n’est pas sans conséquence pour les produits agricoles, particulièrement les fruits.
  • Alors que la vigne ou d’autres productions fruitières comme l’abricot vivent des heures difficiles avec le froid, les pommiers semblent moins exposés par ce gel. Des parcelles pourraient cependant souffrir de dégâts, dans le Limousin en particulier.
  • La cerise, qui est déjà bien avancée dans la floraison, semble aussi passer au travers du filet.

Encore deux nuits et matinées difficiles de gel pour le monde agricole. C’est le constat que fait l’agroclimatologue Serge Zaka qui, sur X, dresse la cartographie des régions les plus touchées par les risques de perte. Le gel en question est dit « radiatif », c’est-à-dire qu’il provient de l’accumulation d’air froid au sol après le coucher du soleil.

« La température passe en négatif plutôt vers le milieu de la nuit, et jusqu’à 7 heures du matin », explique-t-il. Les dégâts sur les récoltes dépendent de cette température mais aussi de la durée d’exposition au gel et du végétal, dont les indices de résistance au froid varient d’une espèce à une autre. Et la pomme, dans ce spectre-là, part avec de sérieux atouts, si l’on compare notamment à la vigne ou aux abricots.

Inquiétude en Limousin

« La pomme est plutôt bien lotie, c’est l’une des espèces en France qui historiquement ouvre ses bourgeons le plus tard, remarque en effet Serge Zaka. Elle est à un stade de floraison un peu moins développé, elle est donc moins sensible que d’autres cultures au froid. » Présents sur beaucoup de territoires, les pommiers ne sont toutefois pas logés à la même enseigne. « Le Sud-Est a de la chance, il y a en ce moment le mistral qui empêche la pellicule de froid de se déposer sur le sol », analyse-t-il.

Le Maine-et-Loire, le Sud-Ouest devraient aussi être plutôt épargnés. Serge Zaka se dit en revanche plus « inquiet » sur le Limousin, qui compte le seul AOC Pomme. « Toutes les parcelles n’atteindront pas le seuil de dégâts, mais c’est la région où la pomme risque d’avoir le plus de perte de rendement. » Mais là encore, cela devrait être du cas par cas, selon les microclimats, avec des parcelles de fond de vallée où s’accumule davantage le froid, et d’autres « qui s’en sortiront, protégées par le vent ou les couvertures nuageuses ».

Ces nuits de gel ne sont pas exceptionnelles

Ainsi, il est difficile pour le moment d’évaluer les conséquences de cette vague de gel sur la récolte des pommes, dont toutes les variétés sont concernées. « Il est beaucoup trop tôt pour le dire, on ne saura que dans quelques semaines ce qu’il reste », fait-on savoir à l’Association nationale pommes poires. « Toutes les régions n’en sont pas au même stade floral, et cela dépendra aussi de ce qu’ont donné les différents dispositifs antigel », détaille Sandrine Gaborieau, responsable de la communication. A l’entendre, cette période de gel de printemps n’est pas exceptionnelle, même si elle est redoutée « à une période de fin de floraison où les fleurs sont vulnérables ». « Ce qui est plus exceptionnel cette année, relève-t-elle, c’est l’avancée de la floraison. »

Pour Serge Zaka, ces nuits de gel n’ont en effet rien d’exceptionnel si l’on met en regard « les 250 records de chaleur entre le 1er et le 15 avril ». Et les grands gels de culture de 2021, 2017 ou 1991. Reste que le tout est une « accumulation d’événements météorologiques », qui « soumettent les agriculteurs à une production plus aléatoire » et « une accumulation de petites pertes de rendement, qui peuvent fragiliser le moral et des économies ».

Mai sera bien le temps des cerises

Il est en revanche une production fruitière qui semble déjà passée entre les gouttes, c’est la cerise. Aucun dégât majeur n’est à ce jour reporté sur les différentes zones de production en Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie et Paca. « Pour l’instant, l’épisode de gel n’a pas d’impact », explique Jean-Christophe Neyron, président de l’AOP Cerises de France, qui reste prudent tant la filière avait souffert des gelées de 2021, il ne faudrait pas que la température baisse quelques degrés de plus au-dessous de zéro.

La floraison des cerisiers s’est faite aussi une semaine en avance sur le calendrier habituel. « On en est au stade de petit fruit, voire plus avancé, ce qui nous permet de passer à travers le gel », affirme-t-il. Même s’il peut encore y avoir des mauvaises surprises au moment du développement du fruit, la cueillette devrait être belle, et les fruits moins nombreux mais plus ronds. « Je suis surpris cette année du calibre des cerises », relève Jean-Christophe Neyron. Ainsi, assure-t-il, « il y aura de la cerise, c’est une belle année ». Elle devrait arriver autour du 10 mai sur les étals.

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