Populaire, rural, solidaire, festif, créatif… Avec ces arguments, Bourges a réussi à devenir la prochaine Capitale européenne de la culture de la France en 2028, succédant à Paris (1989), Avignon (2000), Lille (2004) et Marseille (2013). Depuis, la préfecture du Cher se sent pousser des ailes, tant la capitale historique du Berry, isolée sur la diagonale du vide de la France rurale, ne s’animait vraiment qu’une fois par an lors du Printemps de Bourges, premier festival de la saison et étendard des musiques actuelles.

Cette année, le Printemps qui se tient du 23 au 28 avril fera tout pour incarner les valeurs qui portent l’ambition de la ville de Jacques Cœur… en leur ajoutant déjà une forte dimension européenne. C’est par un grand bal populaire et gratuit que Bourges ouvrira ce soir son festival. La danse sera emmenée par 25 tubes emblématiques venus de toute l’Europe joués par un orchestre nantais fantaisiste et joyeux, Le Bal des Variétistes. Une façon de rappeler, sept semaines avant des élections européennes aux perspectives menaçantes, que la culture reste un socle commun et crée du lien.

Une victoire à la symbolique importante

Bourges ne tient pas pour autant de discours politique, mais revendique l’ambition très festive de cette édition, de son affiche colorée montrant l’image naïve d’animaux enlacés, jusqu’à son programme artistique riche en bonne humeur. « Quand Bourges a été désignée capitale européenne le 13 décembre 2023, la programmation était bouclée, mais j’avais gardé la première soirée en me disant que si nous étions choisis, nous ferions un grand concert gratuit en clin d’œil à Bourges 2028 », explique Boris Vedel, directeur du festival. Musiques actuelles, chansons populaires, « l’Europe se construit avec des imaginaires communs. Ce n’est pas que des normes administratives et de la politique », ajoute-t-il. D’un concert, l’idée se déplace vers un bal, plus drôle, plus participatif, auquel les Berruyers peuvent venir déguisés. Il s’agit de célébrer une victoire à la symbolique importante en invitant à la fête les familles en début de soirée et les jeunes jusqu’au bout de la nuit – les vacances scolaires le permettent.

« Quels sont selon vous les tubes les plus européens ? » La question a été posée via les réseaux sociaux dans l’Union européenne avec le concours du programme communautaire Music Moves Europe. Une liste de 25 chansons venues de 16 pays, élaborée par le directeur artistique du festival, Jean-Michel Dupas, est prête pour une soirée qui permettra aux 33 jeunes talents « Inouïs » sélectionnés cette année de participer.

Abba et Tom Jones, Elli Medeiros et Nino Ferrer…

Que de souvenirs communs dans cette playlist pleine de surprises ! Bourges dansera sur Sara perche ti amo, inusable ballade italienne de Ricchi e Poveri, Money, Money, Money des Suédois Abba, ou Toi mon toit de la Française Elli Medeiros. Refusant de laisser le Royaume-Uni à l’extérieur de l’Europe où il s’est placé depuis le Brexit, le bal l’invitera avec plusieurs titres, dont le très enlevé It’s Not Unusual du Gallois Tom Jones. Des tubes irlandais (avec les Pogues), norvégiens, finlandais, espagnols, belges, allemands, grecs, venus d’Europe et de l’Est ou encore de Guadeloupe, ce concert des nations invitera aussi une chanson du regretté Nino Ferrer, Je vends des robes.

Les têtes d’affiche, les musiciens, les 5 000 professionnels présents chaque année au Printemps, rendez-vous incontournable de l’industrie musicale, arriveront le lendemain pour les 86 spectacles attendus, de Mika à Cat Power, Shaka Ponk ou Clara Luciani. En attendant, Bourges se réjouit déjà en pensant à demain. Aux trains qui desserviront plus vite cette ville sans TGV : « On sera à 1 h 45 de Paris en 2028 ! » ; aux appels à projets qui seront lancés à la rentrée par l’équipe qui s’étoffe : Frédéric Hocquard, délégué général, vient de rejoindre le maire de Bourges, Yann Galut, et le commissaire Pascal Keiser qui ont porté la candidature ; aux recrutements qui vont bon train dans une ville de 64 000 habitants dont l’industrie de la défense était jusque-là quasiment le seul poumon économique. « Petit, c’est pas un souci ! », clamaient les défenseurs de l’ambition européenne de Bourges. À eux aujourd’hui de rêver grand.

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Le Printemps de Bourges 2024

Du 23 au 28 avril, la 48e édition du Printemps de Bourges propose 86 spectacles.

Un hommage à Françoise Hardy orchestré par Sage, avec Thomas Dutronc, Zaho de Sagazan, Clara Luciani, un autre à Kurt Cobain de Nirvana par Béatrice Dalle et Youv Dee, une lecture par Dominique A de ses poésies sont au programme.

Cat Power, folk star américaine, interprètera Bob Dylan dans la cathédrale Saint-Étienne.

Mika, Catherine Ringer, le groupe Shaka Ponk, Olivia Ruiz, M. Pokora, Raphaële Lannadère, Thomas de Pourquery, Eddy de Pretto, Mélissa Laveaux et Virginie Despentes sont à l’affiche.