CRISELes commerçants en alerte face au risque d’une augmentation de leurs loyers

Commerces : « Si on a une augmentation trop forte de nos loyers, on va au désastre »

CRISESollicité par les petits commerçants, le député macroniste Thomas Cazenave porte devant l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à maintenir le plafonnement de la hausse des loyers jusqu’au premier trimestre 2024
Illustration commerces rue Sainte-Catherine à Bordeaux.
Illustration commerces rue Sainte-Catherine à Bordeaux. - Mickaël Bosredon / 20Minutes
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Pour limiter l’impact de l’inflation sur les PME et les ménages, l’indice des loyers commerciaux (ILC) et l’indice de référence des loyers (IRL) avaient été plafonnés à + 3,5 % maximum en 2022.
  • Ce dispositif est censé s’arrêter en juin. Or, selon les prévisions de l’Insee, l’augmentation de l’ILC pourrait atteindre 6 % s’il n’est plus plafonné.
  • Intenable dans un contexte de crise et d’inflation, alertent les petits commerçants, qui demandent donc un prolongement du dispositif de plafonnement jusqu’au premier trimestre 2024.

Opération sauvetage des petits commerces en danger. Sollicité « en urgence » par des associations de commerçants il y a deux mois, le député Renaissance Thomas Cazenave a porté devant l’Assemblée nationale, la semaine dernière, une proposition de loi visant à prolonger le plafonnement de l’augmentation des loyers pour les commerçants et les ménages.

La proposition a été largement adoptée par 259 voix pour et 93 contre, et le texte va être examinée mardi et mercredi au Sénat. « Sa rapporteuse Dominique Estrosi-Sassone (LR) a commencé ar déposer une motion de rejet » s'est inquiété lundi matin le député de la première circonscription de la Gironde, entouré de plusieurs représentants du monde du commerce à Bordeaux, pour qui il est temps de sonner la mobilisation générale autour de cette mesure. Car le temps presse, le dispositif devant s'arrêter au 30 juin.

Pour limiter l’impact de l’inflation sur les PME et les ménages, l’indice des loyers commerciaux (ILC) et l’indice de référence des loyers (IRL) avaient été plafonnés à + 3,5 % maximum en 2022. Or, selon les prévisions de l’Insee, l’augmentation de l’ILC pourrait atteindre 6 % s’il n’est plus plafonné. Intenable, alertent les petits commerçants, qui demandent donc un prolongement du dispositif jusqu’à la fin du premier trimestre 2024.

« Cela fait cinq ans que nous ne faisons plus notre métier sereinement »

« Les loyers sont un poste important de nos dépenses, notamment dans les grandes villes, insiste Bernadette Hirsch, commerçante bordelaise et présidente de la fédération nationale de l’habillement en Nouvelle-Aquitaine. Cela peut représenter jusqu’à 20 % de nos charges, et parallèlement nous avons de moins en moins de perspectives sur notre chiffre d’affaires, donc tout ce qui peut nous donner un peu d’air pour supporter l’inflation est le bienvenu. »



Georges Simon, un autre commerçant bordelais et président de l’association Bordeaux mon commerce, rappelle de son côté « qu’entre les gilets jaunes et le Covid-19, nous avons subi le double effet Kiss Cool, sans oublier que nous entrons dans une période où il faut commencer à rembourser les PGE [prêts garantis par l’Etat]. » « Cela fait déjà cinq ans que nous ne faisons plus notre métier sereinement, et les difficultés sont encore devant nous », abonde Bernadette Hirsch.

« Si on a une augmentation de nos charges, on va au désastre »

Dans ce contexte, « si tout d’un coup on se retrouvait avec des charges supplémentaires sur des loyers qui peuvent représenter plusieurs milliers d’euros par an, voire des dizaines de milliers d’euros, il y a un vrai risque que le modèle économique ne tienne plus », alerte Georges Simon, qui souligne que « dans un grand nombre de rues, nous commençons à avoir de la vacance ».

Selon Bernadette Hirsch, le secteur du prêt-à-porter, qui subit en plus de la crise et de l’inflation des transformations majeures avec la montée en puissance du commerce en ligne et de la seconde main, est particulièrement exposé. Au niveau national, les magasins de prêt-à-porter ont connu, en mai, une baisse de 10,3 %, 15 % au niveau régional, selon des chiffres de la fédération de l’habillement. « Si on a une augmentation trop forte de nos loyers, on va au désastre », estime la représentante régionale du secteur.

« Un projet d’équilibre », défend Thomas Cazenave

L’association Bordeaux mon commerce constate de son côté que cette baisse de chiffre d’affaires est « généralisée » à l’ensemble des secteurs dans la capitale girondine. Et même si la ville reste « attractive », reconnaît Georges Simon, « à Bordeaux, les loyers sont souvent calculés au maximum du maximum, et ne laissent aucune latitude à la moindre variation. Le moindre trou d’air, et c’est le crash ».

Le député Thomas Cazenave souligne qu’il n’a pas souhaité le gel des loyers pour autant, préférant défendre « un projet d’équilibre » qui préserve aussi les bailleurs. Et surtout s’éviter une censure du Conseil constitutionnel. « On joue la sécurité en préférant prolonger un dispositif qui a fonctionné. »

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