Gilles-William Goldnadel au JDD : « Après l’attaque de l’Iran, la capacité militaire retrouvée d’Israël »
ENTRETIEN. L’avocat et auteur de “Journal de guerre : C’est l’Occident qu’on assassine” Gilles-William Goldnadel revient sur son expérience de l’attaque iranienne du samedi 13 avril alors qu’il se trouvait en Israël, et ses conséquences.
Le JDD. Vous étiez en Israël le samedi 13 avril, lorsque l’Iran a attaqué l’État hébreu. Comment avez-vous vécu cette nuit d’agression ?
Gilles-William Goldnadel. Je l’ai vécu dans la colère et non dans la crainte. Je ne saurais vous expliquer pourquoi je n’avais pas peur. Nous sommes munis d’un ami dans chaque maison. Je me disais “peut-être que lorsque les sirènes retentiront, nous nous mettrons en sécurité dans les abris”. C’est peut-être un sentiment totalement illusoire de sécurité. Après coup, je n’imaginais pas dans mes plus beaux rêves de 99 % des engins seraient arrêtés par le Dôme de fer. La surprise est là.
La fermeture de l’espace aérien a été levée très vite. Est-ce grâce à l’efficacité du Dôme de fer ?
C’est grâce à la résilience des Israéliens. Je devais me réveiller à 6 heures du matin dimanche 14 avril pour prendre mon avion pour Paris. Inutile de vous dire qu’à 3 heures du matin, quand je ne dormais pas et qu’on attendait les missiles, j’aurais bien parié qu’il serait impossible de reprendre mon avion dans la matinée. Les Israéliens sont très résilients. Le lendemain matin, nous avons repris la vie comme si de rien n’était. C’était un jour comme un autre.
Que ressentez-vous quelques jours après l’attaque ? De la colère ? De la peur ?
Je ressens de la colère, pas de la peur. Il faut bien distinguer le régime des mollahs, cet organisme tyrannique de la population iranienne, dont 80 % détestent les mollahs d’ailleurs. Sur le plan médiatique, il fut un temps plus humain où le réflexe normal à l’égard d’Israël était de considérer un tout petit pays, sans matière première, en face de colosses pétroliers fortunés et dotés de millions d’habitants. Sans parler de l’hostilité environnementale. Dans les années 1960, 1970, c’est ce qui inspirait une sympathie pour Israël. Désormais, ce réflexe humain naturel envers David contre Goliath, n’existe plus. En raison d’une idéologie médiatique folle, Israël serait Goliath et les autres seraient David. De la même manière qu’Israël serait les nazis et les autres, les nouveaux Juifs. Il faut voir dans quel contexte idéologique fou, les médias, y compris Occidentaux, baignent aujourd’hui. Les normes et les valeurs sont inversées, sans égard pour la réalité dimensionnelle des adversaires en conflit.
Selon vous, cette attaque iranienne est un « anti-7 octobre ». Pourquoi ?
Le 7 octobre, comme je l’ai écrit dans mon Journal de guerre, les Israéliens étaient redevenus des Juifs sans défense, au sens militaire du terme et ont été victimes d’un pogrom. Ce qui s’est passé le 13 avril, après l'attaque de l'Iran, c’est au contraire la capacité militaire retrouvée d’Israël avec son Dôme de fer. C’est la différence entre la nuit et le jour.
Je ressens de la colère, pas de la peur
Quelle a été la principale motivation de l’attaque iranienne ?
Je ne suis pas un expert en géostratégie, d’une part, et je me garderais bien de chercher dans un régime tyrannique islamique la logique ou une rationalité quelconque, d’autre part. Mais à supposer par une hypothèse intellectuelle hardie, d’une certaine manière, les mollahs, en avertissant, ne voulaient pas déclencher une tempête en retour. Ils pouvaient quand même imaginer, même s’ils ont pour l’armée israélienne une estime méritée, qu’il y aurait peut-être un missile qui ferait plus que de s’abîmer à côté d’une caserne et qui pourrait faire 400 morts. Ça aurait été un casus belli total. Donc, le risque pris dans ce cas par les mollahs est immense. Je crois qu’ils se sont sentis dans l’obligation de répliquer à quelque chose qui a été terrible pour eux, une terrible humiliation. Perdre les Gardiens de la révolution en Syrie, y compris le général chargé du lien avec le Hezbollah était dramatique pour eux en termes d’images et en termes militaires.
En même temps, c’est un jeu terrible parce que le grand souci des Iraniens, c’est de pouvoir atteindre le jour où ils auront l’arme atomique. Tout changera ce jour-là. Je ne dis pas qu’ils balanceront immédiatement une bombe atomique sur Tel Aviv. Mais ils pourront, grâce à l’équilibre de la terreur, envoyer 100 000 soldats sans encombre. Comme ce sont tout sauf des idiots, ils ont tout intérêt à prendre leur mal en patience et attendre l’arme atomique, ce qui ne saurait tarder. Ce qui était à craindre le 13 avril, c’était le Hezbollah. S’il avait été de la partie alors non seulement, évidemment, c’était la guerre totale, mais le Dôme de fer aurait été saturé.
L’Arabie saoudite, l’Égypte, de nombreux pays arabes appellent à la tempérance et ne soutiennent pas l’action de l’Iran. Comment expliquer cette réaction de pays, pourtant propalestiniens ?
Il faut bien comprendre les dynamiques entre pays sunnites et pays chiites pour cela. Certains pays arabes n’ont pas les yeux de Chimène pour Israël, mais ils redoutent beaucoup des chiites et en général, de la tyrannie iranienne. Je crois même qu’ils préfèrent Israël et Tel Aviv à Téhéran.
Voyez-vous en France des soutiens au régime iranien ?
Le soutien à l’Iran est pour La France insoumise la marque de la soumission à la radicalité islamique et sans discrétion, sunnite ou chiite, qui se caractérise par la détestation de l’État d’Israël. Cela va beaucoup plus loin qu’une perspective mesquine. Sur le plan électoral, cela s’insère dans la détestation de tout ce qui occidental, juif ou chrétien et qui peut s’appeler Israël ou France aujourd’hui. LFI a franchi le Rubicon.
LFI a franchi le Rubicon
En revanche, ils savent désormais que cela ne va pas leur rapporter grand-chose. Les banlieues radicalisées le sont déjà. Je pense que LFI vise le grand soir. Une alliance antifa et banlieue radicalisée peut marcher. C’est un jeu très dangereux pour tout le monde. Si on ne comprend pas qu’il y a une vision raciste, anti-blanche, on est condamné à ne pas comprendre. On s’en aperçoit facilement dans les manifestations féministes où on ne plaint plus les femmes violées parce qu’elles sont blanches et parce qu’elles n’ont pas été violées par des mâles blancs détestables, mais par des gens qui, au moins dans leur inconscient tourmenté et malade, sont considérés comme des victimes et non comme des coupables.
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