GUERRE EN UKRAINEA qui peut profiter l’absence de nombreux athlètes russes aux JO de Paris ?

JO de Paris 2024 : A qui peut profiter l’absence de nombreux athlètes russes et biélorusses ?

GUERRE EN UKRAINES’ils ne sont pas officiellement privés des Jeux olympiques à Paris, les athlètes russes et biélorusses devraient quasiment être dix fois moins nombreux qu’à Tokyo en 2021. De quoi voir la hiérarchie chamboulée dans certaines disciplines
Les nageurs Nikolay Zuev, et surtout Kliment Kolesnikov et Evgeny Rylov, ici lors des championnats de Russie 2022, auraient pu prétendre à une médaille olympique à Paris 2024. Mais le contexte politique et la position du CIO rendent cette perspective quasiment impossible.
Les nageurs Nikolay Zuev, et surtout Kliment Kolesnikov et Evgeny Rylov, ici lors des championnats de Russie 2022, auraient pu prétendre à une médaille olympique à Paris 2024. Mais le contexte politique et la position du CIO rendent cette perspective quasiment impossible. - Yegor Aleyev/TASS/Sipa USA/SIPA / SIPA
Jérémy Laugier

Jérémy Laugier

L'essentiel

  • Le Comité international olympique (CIO) autorise depuis quatre mois les athlètes russes et biélorusses à participer aux JO de Paris 2024.
  • Pour autant, au vu des conditions mises en place, les Russes devraient être moins de 40 en France cet été, contre 335 lors des précédents Jeux olympiques à Tokyo.
  • 20 Minutes se penche sur les conséquences des absences en pagaille d’athlètes russes et biélorusses potentiellement médaillables.

Les cartes sont-elles totalement rebattues pour cette première Olympiade depuis le début de la guerre en Ukraine en février 2022 ? Si le Comité international olympique (CIO) autorise depuis quatre mois les athlètes russes et biélorusses à participer aux JO de Paris 2024 (du 26 juillet au 11 août), ceux-ci pourront en être à condition de concourir sous bannière neutre, et s’ils n’ont pas activement soutenu l’offensive russe en Ukraine. Le tout en ayant franchi l’obstacle des qualifications, en sachant que beaucoup ont pu en être privés car bannis de la plupart des compétitions internationales.

C’est pourquoi dans une interview au Daily Telegraph le mois dernier, le vice-président du CIO John Coates a annoncé : « Il n’y aura peut-être pas plus de 40 athlètes russes » aux JO de Paris 2024. Et ce en précisant que la Russie, tout comme la Biélorussie, ne pourra à coup sûr pas prendre part aux sports collectifs.

Les volleyeurs russes s'étaient inclinés au bout du suspense, en finale des précédents JO de Tokyo en 2021 contre l'équipe de France (2-3).
Les volleyeurs russes s'étaient inclinés au bout du suspense, en finale des précédents JO de Tokyo en 2021 contre l'équipe de France (2-3). - Sergei Bobylev/TASS/Sipa USA/SIPA

Toujours dans le Top 5 depuis le boycott de 1984

Plus globalement, on se dirige vers la présence dans trois mois de 36 Russes et de 22 Biélorusses, à des années-lumière donc de la proportion au Japon, avec 335 Russes et 104 Biélorusses. C’est simple, la Russie, qui concourrait sous drapeau neutre aux JO 2021 en raison de sa suspension pour un scandale de dopage, avait obtenu environ deux fois plus de médailles (71, dont 20 en or) qu’elle n’aura d’athlètes à Paris cet été.

Depuis son boycott des JO de Los Angeles en 1984, le pays a systématiquement fait partie du Top 5 des nations médaillées sur les neuf Olympiades suivantes, et la liste des disciplines où la Russie occupe en principe un rôle majeur est longue, de la lutte à l’athlétisme, en passant par la gymnastique, l’escrime ou encore la natation.

Prenons un exemple concret. L’équipe de France de lutte, qui rêve de retrouver son éclat de Pékin 2008 (3 médailles, contre aucune en 2021), pourrait-elle par exemple profiter de la probable absence des Uguyev, Sidakov et Sadulaev, tous en or à Toykyo ?

« Savoir que des grands champions russes et biélorusses sont blacklistés, ça change un peu la donne, reconnaît Lionel Lacaze, président de la Fédération française de lutte. Mais le niveau est tellement relevé entre les Américains, l’Iran et le Japon, qu’on ne va pas commencer à faire des projections en fonction de leur absence. » Trois ans après le doublé russe hommes-femmes par équipe à Tokyo, le concours de gymnastique sera forcément redessiné à Paris. A en croire la FFGym, le constat est encore plus appuyé pour la gymnastique rythmique.

« Ce sera vraiment plus ouvert à Paris » pour la GR

« D’un côté, c’est vraiment dommage de ne pas pouvoir retrouver les meilleurs gymnastes russes et biélorusses, à commencer par Alina Harnasko (Biélorussie), qui était troisième aux JO 2021, pointe Géraldine Miche, directrice du haut niveau en gymnastique rythmique tricolore. Mais c’est ainsi, et ça crée une belle émulation sur toutes les grandes compétitions depuis deux ans. Sur ce cycle, on a pu voir émerger des athlètes allemandes, bulgares, israéliennes et italiennes. Ce sera vraiment plus ouvert à Paris et ça peut être un plus pour notre discipline. On nous a si souvent fait le reproche qu’on voyait toujours les mêmes gagner… »

Si bien qu’après son encourageante 7e place au concours par ensemble des championnats du monde 2023 à Valence, l’équipe de France de gymnastique rythmique ambitionne un coup pour ces Jeux à la maison.

L’un des épisodes médiatiques les plus spectaculaires concernant cette épineuse question des athlètes russes et biélorusses a eu lieu en décembre dernier, avec le nageur Kliment Kolesnikov, double médaillé olympique à Tokyo, et qui rêve/rêvait désormais d’or. « Il serait irréel d’aller aux JO dans ces conditions inacceptables, expliquait alors le Russe de 23 ans, détenteur du record du monde sur 50 m dos. Les autres gars participent, ils sont en compétition comme si de rien n’était, et nous, on n’aura pas le droit d’avoir une délégation, un drapeau ou l’hymne. »

Le nageur russe Kliment Kolesnikov, ici lors des championnats de Russie disputés en avril 2023 à Kazan.
Le nageur russe Kliment Kolesnikov, ici lors des championnats de Russie disputés en avril 2023 à Kazan.  - Yegor Aleyev/TASS/Sipa USA/SIPA

« Ce ne sont pas des choses qu’on peut contrôler »

Outre les conditions données en début d’article, le CIO impose que les athlètes candidatant aux Jeux ne soient pas liés à l’armée russe ou biélorusse, ou à des agences de sécurité nationale. Autant de règles que n’accepte pas non plus Evgeny Rylov (27 ans), l’autre nageur phare de la sélection russe, champion olympique du 100 m dos et du 200 m dos à Tokyo. A quel point les nageurs du monde entier suivent-ils de près l’actualité extra-sportive concernant Kolesnikov, Rylov et d’autres durant leur préparation à Paris 2024 ?

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« Ce ne sont pas des choses qu’on peut contrôler, et leur présence ou non ne changera pas la performance en tant que telle d’un nageur, indique Nicolas Castel, l’un des entraîneurs de l’incontournable Léon Marchand. Les Russes ne participent plus aux grandes compétitions, donc on les a un peu oubliés. On suit de loin leur championnat, qui a lieu deux fois par an. Même dans le cas où ils ne seront pas là, on sait qu’il y a toujours des athlètes qui n’étaient pas vraiment attendus sur des Jeux et qui se révèlent. C’est pour ça que selon moi, la bonne approche mentale avant des JO, c’est de s’attacher à ce qu’on peut maîtriser. » Et clairement, la possible évolution des règles concernant « l’admissibilité » des athlètes russes et biélorusses n’en fait pas partie.

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