Mort d’Émile : "Pour la famille, une épreuve très douloureuse et très compliquée"

Le portrait du petit Emile en l'église Saint-Laurent, à La Bouilladisse.

Le portrait du petit Emile en l'église Saint-Laurent, à La Bouilladisse.

Photo Nicolas Vallauri

La Bouilladisse

En parallèle de l’enquête destinée à révéler les conditions du décès, les parents et grands-parents du petit garçon se sont plongés dans le recueillement propre à une existence guidée par la foi. La Provence a pu entrer en contact avec des proches qui tiennent à préserver la ligne de conduite d’une famille unie par le silence.

Un bref aller-retour. D'à peine trois heures. Le temps de voir pour en savoir un peu plus. Peut-être...

Le mercredi 10 avril, Philippe V. et Anne, son épouse, ont quitté leur domicile de La Bouilladisse, à la mi-journée, pour "monter" jusqu'au Haut-Vernet. C'est ici que leur petit-fils, Émile s'est volatilisé, le samedi 8 juillet 2023. Comme à chaque période de vacances, la famille s'était installée dans sa maison secondaire. 

Celle-ci est restée fermée, le 10 avril. Les grands-parents maternels d'Émile ne se sont pas du tout attardés au hameau. Ils sont allés un peu plus loin. À un kilomètre et demi. Au cœur de la nature environnante. Là où des ossements ont été trouvés fortuitement par une habitante de la commune du Vernet, le 30 mars. Ceux du garçonnet. 

Depuis ce jour de fortes pluies et de grand vent, le secteur avait été bouclé par des dizaines de gendarmes postés un peu partout autour et au milieu de ces sous-bois traversés par des sentiers et des ruisseaux au débit plus ou moins dense. Après une partie du crâne et des dents découvertes par cette Vernetoise, adepte des marches au long cours, par tous les temps, des vêtements et d'autres fragments d'os, correspondant à l'ADN de l'enfant, avaient été prélevés dans cette zone au fil de recherches qui allaient, justement, être levées, en cet après-midi du 10 avril. 


"On attend des réponses scientifiques pour savoir comment est mort ce petit garçon"

Alors, avant que l'endroit ne soit rouvert à tout un chacun, les grands-parents venaient d'être autorisés à se rendre sur place. C'est ici, donc, sur chemin inégal et cerné par un enchevêtrement d'arbres couchés à même le sol et d'une végétation désordonnée, que leur deuil pouvait s'accrocher à un lieu.

En plus d'occuper les esprits au sein d'une famille qui fait en sorte de surmonter une épreuve -- la perte d'un enfant -- comme il n’en existe pas d'autres sur l'échelle de la peine. Elle en a vécu d'autres. D'un niveau tout différent. 

La mise en situation organisée le 28 mars dernier, au Haut-Vernet, en fut une. L'enquête, d'ailleurs, n'est toujours pas close. Dans la commune, les fouilles sont terminées, mais il reste encore à connaître les causes ayant occasionné le décès du petit garçon. Une chute fatidique après avoir échappé à la surveillance de ses grands-parents maternels ? Un accident maquillé en disparition ? Un crime ? Les éléments ramenés de la zone de recherches finiront par parler.

"La famille attend de connaître la suite des expertises, signale Me Isabelle Colombani, l’avocate des grands-parents maternels. Aujourd’hui, on attend des réponses scientifiques pour savoir comment est mort ce petit garçon. C’est la seule chose qu’on attend." 

"Ne pas étaler la vie privée, par respect"

Dans cette pénible expectative, les parents et grands-parents d'Émile ont commencé à apprendre à vivre sans Emile. Murés dans une inatteignable intimité. "Par respect", les deux sœurs de Philippe V., contactées par La Provence, tiennent à ne pas s’exprimer, veillant à "ne pas étaler la vie privée" ni trahir le silence souhaité par leur frère et leur nièce, nous a précisé l’une d’elles. "Pour la famille, c’est une épreuve très douloureuse et très compliquée, confie une connaissance. Le fait d’avoir été ou d'être encore suspectée, voire accusée par certains est également très difficile à supporter pour elle."   

Dans leur maisonnette de La Bouilladisse, Marie et Colomban, les parents d’Emile, donnent deux fois plus d'amour à leur autre enfant. Non loin de là, Philippe V., reconnu pour son professionnalisme dans le village, est toujours très occupé dans son cabinet d'ostéopathe situé à proximité de l'église Saint-Laurent où le portrait de son petit-fils, installé là dès le mois de juillet 2023, continue d'éclairer une petite chapelle qui est également devenue l'écrin de bouquets de fleurs blanches déposés par des paroissiens. "Repose en paix Émile", est-il écrit sur de petites cartes.

Ces mots résonnent jusqu'à Aix-en-Provence où les grands-parents maternels, les parents ainsi que les oncles et tantes, dont les plus jeunes sont encore au temps de l’enfance, se rendent, chaque dimanche matin, participant à une messe fidèle aux racines de l'office célébré en latin, dans une église de la ville. Comme avant, Émile est au milieu d'eux. En eux.